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    CARNET DE ROUTE
N° 20/58
 
     
     
" SIBERIE – INDE: sur les traces des goulags "
     
   















 
 
 
Du 20 au 26 aout 2006 / Kumura - Cristovi, BOURIATIE, RUSSIE
 
 
" L’etoile, le tsar et le prisonnier "

 

De la route Kumura – Umkhey on savait qu’il n’en restait rien. On ne sera pas decu de notre navigation entre passe et present, entre evades et prisonniers modernes.

Nos velos chinois auront tenu 70 km (3 jours). Il faut dire que la vieille route en terre est vraiment infernale : des ornieres grosses comme un camion, des lits de rivieres en guise de chemin ( avec des pierres grosses comme des roues de velos voir des
menhirs) auront eu raison des freins, selles, pedales et guidons de nos pietres bicyclettes. Elles nous auront tout de meme permis de rejoindre un camion de ravitaillement pour camps de geologues, lui meme en panne. Debrouillardise russe ou tout peut etr
e solution, nos rustines de VTT permettront au 8 tonnes de repartir (c’est fou aussi de partir sur de tels chemins sans piece de rechange). Ses roues sont hautes de 1.2m et sa puissance equivaut celle d’un tractopelle. D’ailleurs seuls des Oural comme ce
ux la peuvent rouler ici, ou RIEN est egal a une ROUTE.
Cest eux aussi qui nous soulageront de nos mountain bike foutus, pour que nous continuions a franchir leurs ornieres (profondes comme des tranchees d’EDF) et les cols sans plus avoir a pousser ces maudites montures. Sacha (42 ans, chauffeur d’Oural) nous
propose de les recuperer a Ulan Ude (objectif de cette itineraire) alorsqu’Alexei (28 ans, mecanicien) veut absolument nous montrer le sous bois et ses champignons.

On profitera de la lecon pour apprendre enfin a reconnaitre les comestibles des dangereux. C’est l’occasion aussi de se figurer les probables repas des evades. Car cet espace est grand et la nouriture peut y etre accessible: au dela des baies, des myrtil
les, des famboises, des champignons il est possible d’attraper quelques rongeurs (ecureuils, burunduks, belettes). Les canards aussi sont legions mais les pieges plus compliques a faire. Les poissons de rivieres, de lac ou de marais (gardons, perches, br
ochets) sont plus faciles a attraper mais requierent de l’equipement. Cest surtout d’eux que les evades devaient se nourrir : pour nous, ils completent nos maigres repas de pates chinoises.

Depuis le camion ‘geologue’ la route s’est peu amelioree mais les paysages ont extremement varie. Descendre la cote Est du Baikal offre une serie de montagnes orientees Nord-Sud, culminant a 2600m, des cols a 1500m, des forets de melezes et beaucoup de m
arais. Parfois en versant Sud on pourrait se croire dans les pinedes des Landes. Et la on realise qu’ormis ces pinedes, dont le sol est sec, le reste de la taiga c’est l’enfer !!!
On pensait que la Bouriatie offrirait un terrain plus facile a l’evasion que la Kolyma ou la Yakutie. Il n en est rien: les forets jeunes (apres incendies generalement) ou vieilles sont tres denses, les plateaux et les plaines sont principalement fait de
marais flottants ou de marecages quand ce ne sont pas des terres imbibees.
De plus, en quitant les montagnes de Umkhey vers le Sud delimitee par la riviere Barguzin (sans pont), la grande vallee plate (coincee entre 2 chaines de montagnes) est une terre agricole jonchee de fermes tous les kilometres. Et il y a 50 ans, il devait
y avoir autant d’exploitations si ce n’est plus. Les paysans, l’equipement et granges sont encore d’une autre epoque : chevaux et materiels en bois sont courant.
Elle est finalement un des seuls moyens possible d’avancer : non que nous refusions l’evasion mais que hors de ce chemin il est impossible d’avancer a bon rythme et de distancer les poursuivants selon nous. Une evasion est une question de temps et de vis
ibilite : longer la cote du Baikal oblige de franchir plus de 30 rivieres de differentes tailles. La montagne est un environement lent et ereintant. Reste les vallees avec les forets et les marais qui sont tres hostiles... alors que reste il quand on cou
rt pour sa survie ?

Il nous faudra encore une centaine de km pour rejoindre la cote du Baikal sur cette vieille trace.
Et un soir au bord du Baikal, commence comme tous les autres, alors que nous nous preparions a passer une autre nuit froide (-9 degres en plein mois d’aout), 3 freres tsaristes dans une baraque ont ete notre salut. Il nous ont fait penser a des Decembris
tes en migration politique (d’ailleurs leur colonie Bouriate etait Ust Barguzin a 50 km au nord). Bien sur ils regrettent sans la reconnaitre cette belle periode, comme leurs homologues soviets regrettent le communisme bien rouge.
Mais en plus ils ont se sentiment de puissance moderne infaillible selon lequel, leur Russie peut « ne faire qu’un bouchee » des USA si ils venaient a les attaquer : “en un clin d’oeil, ca deviendrait les Etats Unis Socialistes d’Amerique” nous dit Kiril
(33 ans, directeur d’une societe d’import d’additifs alimentaire a Moscou). C’est sans compter sur Fiodor (31 ans, comptable a Yekaterinbourg) pour qui la Russie capitaliste se noie dans la perversion.
Alors finalement on demande a Micha (chef d’equipe dans le batiment) se qu’il pense des annees ‘stalines’ et de la repression. De ses 28 ans dont 7 de prison a Ulan Ude, il nous confirme ce que l’on pensait : le systeme a des peines toujours demesurees (
4 ans pour un blouson vole et 3 pour un bout de shit). Mikhael (Micha) nous dit aussi qu’entre hier et aujourd’hui, la mentalite n’a pas change. Selon lui, la societe Russe a tellement connue la repression (pour d’autre « la main de fer ») qu’il y a une
culture de la prison.
On peut la retrouver aussi bien dans toutes les chansons traditionnelles russes (ca ressemble a de la « chanson francaise » ) que dans la vie societale : le detenu n’est pas un marginal rejete mais un individu a part entiere. « Si tu as les mains et le c
erveaux qui marchent, trouver un travail n’est pas un probleme » rencherit-il. Un peu comme si a force de crier « au loup ! », les russes ne faisaient plus confiance au verdict de leur justice, conclut Fiodor.

Alors que tous les 5 avions les yeux rives dans le ciel suite a cette discussion, cherchant une etoile filante, je me souvenais des propos d’un prof de l’ISEG : “la justice pourrait etre la meme pour tous si nous etions egaux …” disait elle en rigolant.
C’est probablement parce que les Zeks l’avait serieusement compris qu’ils tentaient l’impossible.
L’etoile ne vint pas, seule la croix du cap Cristovi apparaissait dans l’eau du Baikal, malgre le vent et le froid de cette fin d’ete glacial.


Guillaume et Cyril Par Internet

Ps : nous allons feter notre 4500eme km et souhaitons dedier notre travail a tout ceux que l’on AIME et qui supportent cette longue absence. Merci de votre soutien.

 

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